"Comment les sciences, les technologies et l'économie peuvent permettre à l'Europe de vivre sans pétrole", tel a été l'objet de la 9e conférence annuelle du STOA, mardi. Les participants ont présenté une série d'options, allant des voitures électriques équipées de batteries rechargeables jusqu'au remplacement du pétrole par le méthanol, mais tous s'accordent à dire qu'il n'y a pas qu'une seule réponse et que toutes les solutions doivent être examinées avec soin.

Silvana Koch-Mehrin (ADLE, DE), vice-présidente du STOA (service d'évaluation des choix scientifiques et technologiques du Parlement européen) a ouvert la conférence en soulignant les avantages potentiels considérables que représente l'abandon des véhicules conventionnels, à moteur à combustion interne, au profit des voitures électriques qui constituent aujourd'hui une part négligeable du marché européen. Des voitures électriques ont été exposées durant toute la journée devant le bâtiment du Parlement à Bruxelles.

Paul Rübig (PPE, AT), président du STOA, a insisté sur la nécessité d'intensifier les efforts en vue d'améliorer l'efficacité énergétique et de réexaminer les solutions permettant de remplacer les carburants fossiles. Il a rappelé l'importance des transports éco-efficaces, des sources d'énergie durables et d'un réseau social qui privilégie l'éthique et favorise la coopération parmi les citoyens.

Malcolm Harbour (ECR, UK), président de la commission du marché intérieur, a préconisé une étude approfondie sur l'utilisation des carburants fossiles et sur les solutions de remplacement envisageables dans les États membres. Les États membres doivent échanger les informations et les meilleures pratiques dans ce domaine, mais aussi soutenir davantage les nouvelles technologies et les entreprises, par le biais des marchés publics, a-t-il indiqué.

Passer à la voiture électrique privée dans moins de dix ans

Shai Agassi, directeur général de Better Place, qui gérera, dès 2011, des réseaux de charge et des stations d'échange de batteries en Israël et au Danemark, est convaincu que l'Europe adoptera la voiture électrique dans moins de dix ans, étant donné que le prix des carburants est en augmentation permanente et que chaque nouvelle génération de batteries est moins onéreuse et plus efficace que la précédente.

"Les consommateurs opteront pour la voiture électrique lorsque celle-ci leur offrira les mêmes facilités, mais aussi lorsque son prix d'achat équivaudra à celui d'une voiture conventionnelle de trois ans et que le coût au kilomètre sera, lui aussi, le même" a indiqué M. Agassi, tout en ajoutant que la problématique de la faible autonomie des véhicules électriques trouvera sa solution dans la mise en place de réseaux de charge et de stations d'échange de batteries. Il a estimé que "le coût de la mise en place d'un tel réseau à l'échelle d'un pays ou d'un continent équivalait à ses dépenses en carburant sur 6 jours seulement".

Il a également invité instamment le législateur européen à accélérer la transition, car "la Chine apparaît déjà dans le rétroviseur, prête à dépasser", grâce à "une centralisation des prises de décision et à d'importantes économies d'échelle".

"Anthropocène": la nouvelle époque géologique de l'espèce humaine

Prix Nobel de chimie en 1995, Paul Crutzen, de l'Institut Max Planck, a dressé la liste des conséquences du développement humain au 20e siècle. La population mondiale a été multipliée par quatre, les zones urbaines par dix, la production industrielle par quarante et la consommation d'énergie par seize. Cela étant, les émissions de SO2 dues au facteur humain sont deux fois plus élevées que les émissions naturelles, tandis que les émissions de gaz à effet de serre ont également fortement augmenté: 40 % pour le CO2 et plus de 100 % pour le méthane, a-t-il indiqué.

"Avec la révolution industrielle, l'espèce humaine est entrée dans une nouvelle époque géologique: l'"anthropocène", et notre action affecte le climat de manière claire et délibérée", a-t-il affirmé, en précisant que "nous devrions réduire nos émissions de CO2 de 40 % et nos émissions de protoxydes de 70 à 80 %, en économisant l'énergie et en recourant davantage aux sources d'énergie renouvelables.

Répondant à une question concernant la possibilité de faire chuter la température terrestre par le souffre, grâce à la géo-ingénierie, il a déclaré que ce n'était pas encore absolument nécessaire, mais que cette option devait être explorée sans tarder.

Méthanol: un substitut idéal aux carburants fossiles?

Le professeur George Oláh, prix Nobel de chimie en 1994, a fait une présentation par vidéoconférence de la University of Southern California sur "l'économie du méthanol", comme alternative possible à la dépendance du pétrole, du gaz naturel et du charbon. La combustion de ces hydrocarbures produit une certaine quantité de CO2 qui devrait être capturée et utilisée pour transformer le méthane en méthanol, carburant à usages multiples, capable de remplacer l'essence et le diesel, a-t-il précisé.

La production industrielle de méthanol à partir d'hydrocarbures est fortement consommatrice d'énergie, mais certains pays, tels que la Chine, l'Inde et l'Indonésie, optent pour cette solution car ils disposent de réserves de charbon importantes, a-t-il expliqué, en faisant observer qu'aujourd'hui, la production de méthanol de la Chine dépassait celle de l'ensemble de la planète en 2008 et qu'elle avait l'intention de construire 100 nouveaux sites. Le professeur Oláh a recommandé aux responsables européens d'améliorer l'utilisation de sources d'énergie géothermiques et d'électricité en dehors des heures de pointe pour le fonctionnement des unités de production de méthanol, à l'instar du site expérimental mis en service en Islande l'an dernier.